1987 : NIMÈGUE

C'ÉTAIT LE PIED !!!...

 

     Désireux de s'illustrer à nouveau en pays batave (cf. TEXEL 1795 et la prise de la flotte hollandaise par les hussards de LASALLE), le 5ème Hussards, renforcé d'un officier de réserve de l'Armée des États-Unis décidait de tenter, avec une équipe de 11 cadres de réserve l'épreuve de la fameuse Marche Internationale Militaire de NIMÈGUE qui a traditionnellement lieu, depuis 70 ans, à la fin du mois de juillet.
     Disons-le tout net : contrairement à ce que certains pourraient croire, 40  kilomètres par jour sur du bitume, 4 jours consécutifs avec un paquetage de 10 kilos, c'est très... très éprouvant.
     Dès le premier jour, ceux qui n'ont pas chaussures faites à leur pied ou qui ont voulu tenter des petites crèmes-miracle en sont vite pour leurs frais, des ampoules géantes apparaissant dès les premières heures de marche et se transformant agréablement dès le deuxième jour, en plaies sanguinolentes. Tel notre bien aimé chef d'équipe, le Lieutenant-Colonel d'ÉVRY qui fera preuve d'un courage physique exemplaire en terminant l'étape du quatrième jour très lentement peut-être mais pratiquement sur des moignons.
     Notre bivouac et lieu de repos n'est pas des plus bucoliques et son implantation près d'un générateur de courant, lancé dès 2 h 30 nous assure chaque matin un réveil monastique.
     Après un solide petit déjeuner très anglo-saxon et le chargement des vivres de route individuels, nous prenons la route dès 5 heures. Il fait encore nuit. Beaucoup d'équipes nous ont déjà précédé, d'autres seront plus tardives. Heureusement car le lancement sur un même itinéraire de 7000 militaires dont 1000 femmes appartenant à 14 nations différentes, réclame une solide organisation.
     L'équipe a choisi de s'accorder quelques minutes toutes les heures et de se faire accueillir dans les "RUST" (deux ou trois zones de repos installées sur l'itinéraire) par des détachements logistiques des armées étrangères, la BUNDESWEHR nous réservant très souvent le meilleur accueil. Les remises en route sont toujours dures ... très dures. Mais au prochain village l'équipe s'offrira un "must" en chantant pendant la traversée de l'agglomération. Provocation ou pas nous sommes très attachés au "Gai Luron des Flandres" qui semble (en canon) avoir un réel succès. L'arrivée dans chaque village est l'occasion de soigner l'image de marque, car il y a beaucoup de public pour encourager les concurrents. Il y a toujours un "ancien" pour remettre un peu d'ordre dans notre alignement. Fréquemment, la fanfare municipale est là pour nous encourager et donner la cadence.  L'ambiance est sympathique et l'accueil chaleureux pendant ces longues heures où la population voit sans discontinuité défiler des centaines d'équipes de nations différentes. Quant au Major MORITZ, le camarade de l'US Army qui marche avec nous, il nous quitte parfois ... trouvant le rythme trop lent. Tout le monde a la volonté de finir l'étape tout en sachant que demain, il faudra remettre ça. Les moins entraînés souffrent... mais ne voulant pas donner dans le psychodrame ni dans l'autosatisfaction nous ne nous étendrons pas plus sur l'exploit quotidien qu'ont représenté pour tous, les derniers kilomètres de chaque étape.

     Sur le parcours nous rencontrons fréquemment notre "coach" le Colonel GAGNIARD. Il dispose d'une voiture, s'occupe de la logistique. Son problème est de s'infiltrer dans le dispositif malgré les barrages routiers neutralisant la circulation automobile et d'être présent à notre passage, au point et à l'heure fixés.
     Il y a aussi et surtout la charmante Dominique,  qui, comme le prévoit le règlement, nous sert d'ordonnance et nous suit en vélo sur un "Raleigh" du meilleur effet. Elle s'occupe des soins, réconforte (en tout bien, tout honneur) le hussard momentanément défaillant et, pour nous encourager elle fera bien la moitié du trajet à pied, portant crânement un béret très "british" aux armes du 5ème Hussards. Elle a la chance de pouvoir se reposer, en toute intimité, le soir dans une chambrée éloignée de notre camp où ne logent que 500 femmes ...
     Au bout de 8 à 9 heures de marche, lugubre parfois, après avoir bouclé largement nos 40 kilomètres, nous revenons au point de départ. C'est l'heure des soins. Le Chef d'escadrons toubib, Marc BREHON, s'occupe des pieds de ses coéquipiers qui sont de jour en jour plus inquiétants. Il "charcute'' avec les moyens du bord mais les hussards du 5ème restent stoïques devant la douleur. Sa spécialité est rapidement connue du reste du camp français et il soigne alors également le détachement du 8ème R.I. de Noyon et un autre du 43ème R.I. de Lille. Même certains dos, trop bien caressés par le frottement du sac ne sont que plaie.
     Le moral au bivouac reste solide grâce surtout aux bons mots et à l'humour du Capitaine THIERS ainsi qu'aux récitals de pipo du Capitaine LEMAIRE. Mais le meilleur gage ce fut, la fatigue aidant, cet officier supérieur distingué à qui le toubib avait fait passer un comprimé de remise en forme (à ingérer par voix buccale, mais il ne le lui avait pas précisé!), qui avait cru bon de le précipiter dans la bassine d'eau froide où trempaient ses pieds déjà bien endoloris !...
     Chaque soir quelques cartons d'invitation conduisent, outre le Colonel GAGNIARD les deux ou trois officiers les plus en forme (ou les plus assoiffés) aux réceptions offertes quotidiennement par les grandes délégations : l'Armée des États-Unis, puis celle du Royaume-Uni suivie des Armées conjointes de Norvège, de Suède et de la R.F.A. et enfin celle du Canada avec un barbecue monstre où le T-bone fut fort apprécié. Au cours de ces réceptions, la présence d'une délégation française bien que squelettique a été assez remarquée car depuis 14 ans la France brillait par son absence. Questionnés sur les motifs de cette absence, nos hussards très diplomates se devaient de rester très évasifs. OUF! Bientôt la remise des récompenses
     Le contrat fut finalement rempli car la défaillance d'un seul aurait pénalisé la totalité de l'équipe. Nos hussards étaient venus à NIMÈGUE pour gagner en équipe : ils y sont parvenus. A l'issue de la marche, le Consul de France nous remettait diplômes et médailles... et nous demandait conseil sur la "marche à suivre" pour convaincre l'Armée Française d'être massivement présente à NIMÈGUE... dans les années futures.
     Mais Monsieur le Consul, c'est une affaire de relations publiques... voyez le SIRPA! Par la voie hiérarchique et... diplomatique bien sûr.
     Nous, on marche!

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